Tristesse

- "Pourquoi t’as les yeux mouillés ?"

Nildhonca releva la tête, et observa l’enfant, contemplative de toute sa joie, admirative de son innocence. Elle releva d’un geste lent les mains devant ses yeux, doigts serrés, et sécha ses larmes. Ses yeux étaient toujours embués, mais ses joues étaient d’ores et déjà moins humides.

- "Je suis un peu triste…"
- "Oui mais pourquoi ?"
- "Parce que… J’ai bobo le cœur !"
- "Tu veux un câlin ?"

C’était une demande si attendrissante que Nildhonca ne pût se résoudre à la repousser, quand bien même elle savait déjà que cela ne servira à rien. L’enfant la prit dans ses bras, peinant à faire le tour des épaules de la Dame de Pikcswiel. Elle la serra très fort, de ses petits bras d’enfant.

- "Je t’aime très fort…" murmura alors le petite fille, un sourire d’ange sur les lèvres.

Mais Nildhonca ne répondit pas : ni à ses mots, ni à son geste de tendresse et d’amour. Elle tenta simplement de ravaler les larmes qui lui montaient à nouveau aux yeux. Elle tenta de faire le vide dans ses pensées sombres, et de chasser les tristes idées qui lui passaient par la tête. L’essai, ou plutôt les essais était peu concluants, guère fructueux. Elle se contenta de patienter que l’étreinte s’achève, et soupira.

- "C’est pas mieux ? T’as toujours bobo ?" murmura l’enfant, la tête dans les cheveux de Nildhonca.
- "Ne t’inquiète pas… Le bobo va guérir avec le temps. Il faut toujours laisser faire le temps."

L’enfant ne comprenait guère le sens caché, et même le sens visible de ces propos. Elle se contenta de relâcher son étreinte, osa déposer un baiser sur la joue de Nildhonca, et quitta la pièce. Elle s’écroula sur son lit, soulageant les douleurs de son dos d’avoir trop pleuré. Et ferma les yeux. Elle aurait voulu s’évader vers sa forêt, oublier son quotidien, et la charge que tout cela lui incombait. Les yeux clos, elle tentait de retrouver l’odeur des arbres, le piaillement des oiseaux. Toutes ces petites choses qui l’apaisaient, et la calmaient. Une main de chaque côté de sa tête, elle posa chacun de ses index sur ses tempes, et soupira à nouveau.